Woya Shi Havi
Tu viens d'où?
Woya Shi Havi - Tu viens d’où ?, 2017-2018
Avec Mégot et Papajan
Polyptique, 5 fresques murales
Résidence artistique croisée Mayotte - La Réunion
Production Cheminement(s, projet cofinancé par le Fonds européen agricole pour le développement rural - FEADER
Technique mixte, 3 x 20 m.
Bandraboua, Mayotte.


Technique mixte, 1 x 40 m.
Chiconi, Mayotte.



Chiconi, Mayotte.
Technique mixte, 1,50 x 2 m.
Chirongui, Mayotte.




Technique mixte, 3 x 15 m.
Iloni, Dembéni, Mayotte.



Technique mixte, 4 m de hauteur, 25 m de circonférence.
Le Maïdo, La Réunion




« Les lignes, les figures, les formes et les couleurs, bases de travail de tout artiste plasticien, forment un langage imaginaire à la fois abstrait et universel. Certains street artistes déclinent des grammaires visuelles dans l’espace urbain chargé d’histoires, alliant les fonctions décoratives aux messages citoyens ou militants, entre autres récits des rapports humains. Le propre de l’art réalisé dans la rue, en plus de s’adresser à tous en habitant l’espace public pour le sublimer, le questionner ou le « faire parler », est aussi de traverser les frontières, rencontrer l’ailleurs et se répandre sur les parois du monde.
Woya Shi Havi prend la forme d’une fresque croisée, dispatchée en plusieurs « panneaux » sur différentes zones géographiques symboliques, visible aux extrémités Nord, Sud, Est et Ouest de Mayotte et sur les hauteurs d’une route reliant la mer au cœur des cirques de La Réunion.
Elle se présente alors comme une œuvre à relier par les pas, le regard, la parole et la mémoire de ceux qui les traversent, et opère ainsi des traits d’union entre plusieurs points d’Histoire et d’éclatements, de départs ou d’arrivées, d’explorations, de conquêtes ou de fuites, requestionnant l’idée même de frontières et d’insularité et rendant compte des liens étroits existants entre nos deux îles sœurs.
Prenant forme au sein de résidences d’études et de production, mais aussi d’écriture et de médiation - l’enjeu de ce projet réside avant tout dans le partage et la traduction visuelle des recherches, recueils de paroles, de souvenirs et de témoignages à la fois scientifiques, empiriques ou ésotériques, et autres fouilles « expérientielles » opérées par les artistes sur ces différents territoires d’interventions.
L’ensemble de ces fresques, présentées sous forme de planches de recherches ou carnets de croquis muraux, rend ainsi compte d’une histoire forcément parcellaire, en partie imagée, à la fois réelle et fantasmée. Mais aussi d’une certaine mémoire retraçant les origines multiples du peuplement de Mayotte et de La Réunion comme sources de leur grande diversité, qu’il s’agit moins de stigmatiser que de continuer à construire et à enrichir. »
Leïla Quillacq, directrice artistique du projet
Aux 4 points de Mayotte
Les pourtours d’un archipel
« Les parties de la fresque réalisée à Mayotte partent de l’idée des 4 points cardinaux pour créer un rythme territorial, où 4 endroits de l’île seraient marqués par les interventions artistiques, et appréciables par les habitants de l’île.
Pourquoi ces 4 points ? Car une île en tant que territoire est un lieu d’accueil ou de départ. Une île vit avant tout par son rapport à la mer, à la migration au fil du temps, aux importations et exportations, à sa dialectique intérieur/extérieur.
C’est sur une réflexion d’influences et de flux culturels qui ont peuplé les Comores, et donc Mayotte, que veut porter notre travail plastique. Par exemple, l’apport des Austronésiens, la pratique soufie, l’arrivée des Bantous, la traite d’esclaves, les Shirazi, les razzias Betsimisarakas et même les premiers mouvements Sakalaves… autant de péripéties qui font la richesse culturelle de l’île. »
La Réunion, au coeur d’une île
Entre visible et invisible
« La continuité de ce travail sur La Réunion consiste avant tout en un échange avec un artiste mahorais, Papajan. C’est signifier une présence de la culture comorienne dans la diversité réunionnaise. Woya Shi Havi Mayotte nous ayant permis de trouver un mode d’écriture plastique à 6 mains, la fresque du Maïdo à La Réunion prolonge cette mise en forme, avec un fond historique et culturel propre au lieu. De la forêt primaire, lieu de dissimulation pour les Marons et espèces endémiques, à la colonisation de cette forêt pour une survie économique, le Maïdo représente cette route entre le domaine Desbassayns jusqu’à l’entrée du cirque de Mafate. Appréhender la citerne, support circulaire, avec une
face visible de la route et une face cachée, c’est jouer sur l’histoire, sur ce qui est facilement connu et retenu du lieu (la Glacière, la culture du géranium, les essences cultivées, les ti bon dieu, les charbonnières, M. Lougnon…) et une partie plus méconnue, difficilement détectable et à préserver (l’histoire et les traces du maronnage, les espèces endémiques à protéger, les secrets à garder). »
MAYOTTE
« Les fresques de Mayotte s’inspirent des différentes cultures et populations ayant occupé le sol de l’archipel des Comores sur une fourchette historique d’environ 500 ans de notre ère, du 9ème au 17ème siècle. Une palette large, l’objectif étant de voir le panel d’influences venues, schématiquement, des 4 points cardinaux. Même si l’histoire et les flux migratoires sont plus complexes que cela, l’approche artistique a souhaité « simplifier » et s’exposer sur les murs de manière à rendre accessible les informations récoltées. Les artistes nous offrent là un panel non exhaustif et non hiérarchique, une sorte d’ « éparpillement » d’informations dans un cadre de fouilles virtuelles choisi. Sur les murs, cela se traduit par un morcellement dessiné de la fresque, comme des restes d’enduit intégrant des inscriptions, des dessins, des notes, des observations ayant résisté au temps, alors que d’autres ne sont plus visibles. Ces choix de compositions plastiques entendent montrer l’aspect parcellaire de leur humble contribution à témoigner de la richesse culturelle dont est issue la population comorienne d’aujourd’hui. »
Jean-Marc Lacaze
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