« La vidéo Le filet est une œuvre collaborative qui fait partie, au même titre que la vidéo Filets réalisée par l’artiste Soleïman Badat, d’un protocole élaboré par Dominique Ficot, artiste tisseur et performeur.

Dominique Ficot développe tout au long de son oeuvre une réflexion plastique sur le corps à travers l’objet du filet qu’il envisage comme un emblème des relations sociales et des interconnections métaphysiques. Dans le protocole du filet de douche, il interroge la nature genrée du regard sur le corps. Deux vidéastes, un homme, une femme, sont alors sollicités pour le filmer tour à tour lors d’une performance intime. Celle-ci consiste à prendre une douche nu, derrière un filet tissé de ses mains. Il laisse toute liberté de regard et d’interprétation à ses partenaires vidéastes.

Le filet est-il l’objet d’un regard féminin ? Peut-on extraire ou même définir ce qui fait féminin chez un être ? Je n’ai pas la réponse. Quoiqu’il en soit, cette invitation m’a touchée. Il s’agissait d’explorer un espace sensible et poreux entre deux tissus, celui du filet en tant que paroi extérieure et celui de la peau que l’on perçoit en second plan. Dans l’apparente banalité d’un geste d’hygiène quotidienne, le filet jette le trouble, instille une dimension surréaliste à la limite de l’absurde, le filet ne cachant rien et ne retenant pas l’eau.

En intitulant la vidéo Le filet j’ai choisi d’évoquer l’objet en tissu mais également le filet d’eau qui s’écoule le long du corps. Ce dernier suggéré par les sons (gouttes, glouglous, pluie fine et dense) s’insinue partout dans l’image et entre en résonance avec les mailles du filet de tissu. L’eau active une métamorphose. Elle diffracte le corps traité de manière kaléidoscopique, opère une mue liquide et translucide qui dissout les chairs et le métal présent dans le tuyau et le pommeau. »

Clotilde Provansal