Radio Terla






Photographies © Olivier Padre
« (…) Peut-on dire que tu fonctionnes par association d’idées ?
SB
Oui, c’est ça, par vases communicants. Si ma façon d’opérer avait eu une forme, elle aurait pu relever de l’opportunisme du quotidien, de la contamination d’idées, un processus parfois exponentiel, voire obsessionnel sur certains sujets. Il y a ce qui me vient de l’extérieur — du quotidien, des voyages — et ce qui réapparaît de mon intérieur, ce qui n’en a pas fini avec moi.
Par exemple, au début de mes études, il y a eu le motif du banyan que j’ai tenté d’épuiser sous toutes ses dimensions. Depuis quelques années, la ruine contemporaine et ses formes dérivées, comme la case créole abandonnée, ont occupé une bonne partie de ma pratique visuelle, ainsi que les archives, la mémoire : comme dans un de mes derniers projets, Radio Terla. J’ai repris ces motifs de ruines, de cases et d’abris, qui se sont articulés avec tout un corpus sonore composé d’archives de l’île, réelles ou réinventées.
C’est comme s’il fallait pousser ces motifs jusqu’à ce qu’ils m’ennuient ou qu’ils se vident de leur sens. Une fois que c’est fait, je passe à autre chose. Parfois, cela prend la forme d’un épuisement ; d’autres fois, un élément ouvre une nouvelle porte, puis une autre, et là, c’est du domaine de l’expansion.
Cette notion d’expansion, je l’ai évoquée avec Myriam Omar Awadi dans le cadre de notre exposition Mécaniques ondulatoires, à la Galerie du Téat Champ Fleuri en 2010. J’avais installé un grand papier sur lequel j’avais écrit le maximum de mots qui me venaient sur le moment. Sur le mur d’à côté, j’ai écrit « À qui appartient ce mur ? ». J’y avais laissé un stylo, et les visiteur·euses ont écrit leurs réponses. C’était de l’ordre de la pensée flottante et cela illustrait pour moi le flux ininterrompu et permanent de la pensée. Probablement une réminiscence de ma lecture de George Perec, Tentative d’épuisement d’un lieu parisien, plus de dix ans auparavant. (…) »