Chloé Robert

MÀJ. 03.12.2021

C’est un singe qui ne court pas avec ses pieds et ses mains mais avec son énergie vitale, avec la mémoire vive de sa préhistoire. Chloé Robert l’a fait apparaître à coups de griffes. C’est pour cela que l’on sent, en creux, une lame sombre traverser son travail. C’est un monde perdu qui s’ébroue sur le papier. Son geste surgit sans préambule, il n’a pas le temps pour la politesse. Ce faisant, Chloé Robert dépouille sa pratique des enseignements académiques et de leurs codes. Elle procède en cherchant le chemin de sa propre source, sans attendre la validation de l’intellect. L’acte de dessiner, qui prévaut chez elle, prend toujours appui sur le premier trait qui lui sort des doigts car s’il est arrivé là, c’est qu’il est nécessaire, comme le sont les animaux et ce que l’on appelle la Nature. Les figures qui apparaissent dans ses dessins le font le plus souvent face public. On se sent réellement regardés, interpellés, comme face à cet homme-salade à la langue pendante et au regard franc. Il vit dans une dimension propre à lui, à son espèce. Ce qui, mécaniquement, nous renvoie à notre propre endroit, individuel et collectif, à notre façon d’être un humain au monde. Un autre être végétal nous offre un regard, qui, quant à lui, est mélancolique. Il semble déçu des promesses non-tenues de l’existence. La Nature lui manque, la vraie, la pure, l’idéale, et il fixe le gouffre de cet impossible retour. « Mais tout cela, c’est juste un rêve » dit Chloé Robert.

Marie Birot, 2021.

Réalisation Frédéric Ramade
Production ARTE en partenariat avec l’ADAGP et le FRAC Réunion.
Chloé Robert © ADAGP, Paris, 2022 ©
ARTE France Développement, ADAGP, 2022

Carnet

Écrits de l'artiste

Vie/mort/Vie

« La menace pèse.

Ses yeux vifs sur mon ventre :
C’est le signal.

Retrousser les babines et grogner.

Élancer ma rage sur la bête monstrueuse,
M’offrir au destin.

Un long croc perfore une troisième narine de lave,
Une gueule arrache gencives et porcelaine.

Le goût du sang, plus de maîtresses, plus d’horizon.

S’acharner sur la montagne ancestrale,
S’y briser les os.

Un battement de poil,
Trou noir nano-tubes de carbone.

Ne jamais oublier la grandeur du loup fâché.

Se relever,
Sourire rouge d’une mâchoire démontée. »

Chloé Robert, 2021
Catalogue de l’exposition collective Mutual Core, sous la direction de Julie Crenn, Marie Thiann-Bo Morel, Gilles Clément, Emanuele Coccia, édition FRAC Réunion, distribution Les Presses du réel

Je cherche l’humain sauvage

« À la poursuite d’un « être originel » en l’homme, je cherche cet humain sauvage doué de capacités ancestrales enfouies à l’intérieur de lui-même. Dans cette société étourdissante et confuse qui se transforme et nous transforme à une vitesse phénoménale, je questionne les mécanismes qui font de nous des êtres de moins en moins connectés à notre environnement, à notre univers, à notre cosmos. L’intuition nous est héréditaire, mais cette organisation du monde nous pousse à ne plus l’entendre. À travers le dessin, la peinture, l’animation, le collage, je travaille le rapport à l’immédiateté dans le geste de création en lien direct avec la place de l’instinct dans notre fonctionnement humain. »

Chloé Robert, 2019.

TECHNIQUES ET MATÉRIAUX

Dessin
Peinture
Encre de Chine
Acrylique
Huile
Fusain
Couture
Broderie

Gomme
Craie
Papier
Noir et blanc
Contraste
Couleurs
Céramique
Coton
Tissus de seconde main

MOTS CLÉS

Ligne
Improvisation
Concentration
Connexion
Intuition
Instinct
Métamorphose
Transformation
Dualité
Identité
Yōkai
Hybrides
Monstres
Vivants
Animal
Animalité
Prédation
Protection
Puissance
Fragilité
Yeux
Âme
Esprits
Subconscient
Sauvage
Brut
Force
Origines
Archaïsme
Primordial
Mémoire
Intemporel
Totémique
Ancestral
Croyances
Spiritualité
Visible
Invisible
Invocation
Intangible
Art Pariétal (Grotte Chauvet)
Art folklorique

ARTISTES

Belkis Ayón
Frédéric Bruly Bouabré
Loren Erdrich
Salomé Fauc
Makiko Furuichi
Pan Gongkai
Paul Jacoulet
Emma Larsson
Sophie Lécuyer
Henri Matisse
Hayao Miyazaki
Solange Pesoa
Douanier Rousseau
Fabienne Verdier

LIVRES

Pierre Boulle, La Planète des singes, éditions Julliard, 1963
T.C. Boyle, L’Enfant sauvage, éditions Grasset, 2010
Anne Chesney, Rivages Maouls, 1994
Maryse Condé, Célanire Cou-coupé, éditions Robert Laffont, 2000
Boris Cyrulnik, Mémoire de singe et paroles d’homme, éditions Hachette, 1983
Clarissa Pinkola Estés, Femmes qui courent avec les loups, Ballantine Books, 1989
Rudyard Kipling, Le Livre de la jungle, Macmillan & Co., 1894
Brigitte Koyama-Richard, Yôkai : Fantastique art japonais, éditions Philippe Picquier, 2017
Michel Leiris, L’Afrique fantôme, Gallimard, 1934
Claude Lévi-Strauss, Tristes tropiques, Plon, 1955
Shigeru Mizuki, Dictionnaire des Yôkaïs, Kōdansha, 2008
Simon Njami, Africa Remix, Hatje Cantz, 2004
Frédéric Peeters, Aâma, Gallimard, 2019
Jean-Christophe Rufin, Rouge Brésil, Gallimard, 2011
Hiroaki Samura, L’Habitant de l’infini, Kōdansha, 1994
Barry Schwabsky, Vitamin P, Phaidon Press, 2004
Victor Segalen, Essai sur l’exotisme, Fata Morgana, 1978
Patrick Süskind, Le Parfum, Diogenes Verlag, 1985
Michel Tournier, Vendredi ou la vie sauvage, éditions Gallimard, 1971

FILMS

Jacques Demy, Peau d’âne, 1970
André Laloux, La Planète sauvage, 1973
Matt Reeves, Dawn of the Planet of the Apes, 2014
Matt Reeves, War for the Planet of the Apes, 2017
Rupert Wyatt, Rise of the Planet of the Apes, 2011
Wolfgang Reitherman, Jungle Book, 1967