Jack Beng-Thi

UP. 01.04.2025

Dream in Africa, 1995

Dream in Africa, 1995
Installation, fibres végétales, terre cuite, cornes, pierre sable, lumière, 600 x 200 x 200 cm.
Photographie © Marcus Welss
Collection musée d’art moderne de Windhoek

« (…) C’est finalement entre l’immobilité et l’impression d’un mouvement global du corps, entre la fatalité écrasante et la possibilité d’un échappement, que le sculpteur navigue. C’est peut­ être là que réside la possibilité du geste libérateur. Ainsi, dans une œuvre comme Kalba-Pangu, sculpture d’un corps en terre cuite enserré dans des fibres végétales et soutenu par des tuteurs en bois, le mouvement d’échappement se dessine de manière singulière : plié en deux, la tête vers le sol, l’homme souffle en direction d’une pierre de volcan. L’air qui émane de sa cage thoracique est matérialisé par un fil de nylon. Néanmoins, le corps de l’homme est pris jusqu’à la taille, dans de la natte tressée. Son buste est ligoté et tenu droit grâce à des tuteurs en bois. Contraint dans sa motricité, il s’émancipe en visant non la verticalité d’une fierté toute sociale, non la linéarité de la fuite, mais une posture bien différente : un angle fermé qui lui permet de s’évader par le sol, une posture a priori soumise qui lui permet de voyager dans les méandres de la matière. La révolte à l’œuvre chez cet homme s’appuie alors sur l’inventivité du corps contraint. Ce corps va saisir dans une verticalité inversée, tête vers le sol, la chance de sa libération.

Dans son installation Dream in Africa, l’artiste joue plus franchement de la verticalité inversée, puisqu’il matérialise un homme en terre cuite et fibres végétales, pendu par les pieds. La verticalité inversée devient une liberté par la matrice du rêve. Malgré les contraintes qui s’exercent sur son organisme, le sujet parvient à réaliser un geste libérateur bien que paradoxal. Il s’échappe, non en se défaisant de ses liens, mais en s’y soumettant. Il réinvente ainsi son rapport à l’espace et fait du sol un lieu d’investigation possible. (…) »

Aude-Emmanuelle Hoareau
Extrait de Sculpter le corps du soulèvement, 2019
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