What could a « Braille nipple kit », little walls made out of sugar cubes and a film showing the escape and torments of a Creole woman on the peaceful banks of a river possibly have in common ? At first glance, Leïla Payet’s work seems evasive, indescribable and hard to figure out. Just like the artist herself, it is made up of a wide range of forms and questions, chaotic and complex, the product of ceaseless ricochets, indicators of her extreme receptiveness to the world and nebulosity. Her work should be understood as the unfurling of a (plastic) way of thinking that develops as layers, from her performance pieces to her research projects on the makings of culture and of its narratives. From the experience of solitude to the great dance of life. But in order to analyse it, one must first force oneself to eliminate any and all attempt at generalisation and approach it as scattered fragments. Only then does her enigmatic output reveal itself as a « construction » in which each work never ceases to question and renegotiate art’s relation with society.

Extract from She Is an Island, Indescribable and Indivisible - Language and Space in the Work of Leïla Payet, by Diana Madeleine

Translated by Lucy Pons | Biographical notes translated with the support of the Centre national des arts plastiques - Cnap.

Mots clés

  • reformulation
  • archives
  • jeu
  • collage
  • cuisine
  • recettes
  • citation
  • mille-feuilles
  • processus
  • composition
  • créolisation
  • nous

Champs de référence

Aimé Césaire, Discours sur le colonialisme, 1950.
Edouard Glissant
Le musée imaginaire, André Malraux, 1947.
Umberto Eco, L’œuvre ouverte, 1965.
André Leroi-Gourhan, Le geste et la parole, 1964-1965.
Chris Marker, Les statues meurent aussi, 1953. Rapport à l’archive comme reformulation d’une narration.
Gilles Deleuze
Bénédicte Savoy et Felwinn Sarr, Rapport sur la restitution du patrimoine culturel africain, 2018.
Henri Laborit, Éloge de la fuite, 1976.
Jacques Rancière
Christine Buci-Glucksmann
Annie Lebrun
Marguerite Duras
Nathalie Béasse
Jun’ichirō Tanizaki
Antonio Gallego (travailler le groupe, fabriquer un « nous »)
Donna Harraway
Catherine Baÿ
Joris Lacoste
Maya Deren
Christian Ghasarian
Homi Bhabha, Third Space (théorie socio-linguistique post-coloniale)

Ma grand-mère

Écrit de l'artiste

Depuis 2008, je m’intéresse à la société à laquelle j’appartiens : l’île de La Réunion, territoire colonisé par défaut, puis par affection et issu des migrations, des fuites, des exils et finalement des intérêts économiques. La situation géographique et historique de l’île ont fait d’elle d’abord un territoire physique façonné par la mer. Elle est à la fois un port, un lieu d’attente, un second choix, une zone de repli, une gare, une prison, un espace de stationnement, un garde-manger, un lieu de passage, une belle maîtresse. Ces différents changements d’états ont rendu le territoire particulièrement « liquide », c’est à dire propice au changement continu. Mon postulat en tant qu’artiste est de penser que si le territoire physique a été façonné par l’eau, le territoire psychique, c’est à dire la mémoire, l’est tout autant. Ainsi, mon corpus d’œuvres tente d’appréhender « le processus de créolisation » vu à travers le concept de « l’état liquide » défini par Deleuze. Cela consiste à faire un aller-retour entre définir ce processus de l’être par : l’image, la pensée, et la création d’un récit expérimental plastique protéiforme, “travaillé par le rêve permanent, tentant de rejoindre l’universelle variation…
Leïla Payet

Resources and critical texts

Leïla Payet | Elle est une île : indicible et invisible

Par Diana Madeleine

Que peuvent bien avoir en commun un « kit de tétons pour braille », des petites murailles en carrés de sucre et un film mettant en scène la fuite et les tourments d’une femme créole dans le paysage paisible d’un bord de rivière ? De prime abord, le travail de Leïla Payet paraît insaisissable, indescriptible. On ne peut réellement le cerner. Fait d’une grande diversité de formes et de questionnements, chaotique et complexe, il est à l’image de l’artiste, le fruit de rebonds incessants, marqueurs de son extrême perméabilité au monde et de sa nébulosité. Son travail doit se lire comme le dépliement d’une pensée (plastique) en mouvement, il se développe en strates, des travaux de performance jusqu’aux projets de recherche sur la fabrication de la culture et de ses récits.