Stéphane Kenkle

UP. 27.06.2023

Stéphane Kenkle’s painting focuses mainly on the depiction of the human figure and family portraits. His subjects, which he presents as half-length or full-length portraits, are painted in Fauvist colours with eyes wide open, suspended in pattern-studded spaces. Their attitudes seem to indicate that they are posing as they would in a photography studio, as if they were trying to give the impression of a “respectable” family – a tightly knit clan in which roles are assigned and performed according to the norm. But then one notices a hand hidden behind someone’s back, a foot bent inwards, or a tense clasp. A feeling of unease cracks the image and gives the fabricated nature of the reunion away. The backgrounds of the portraits, covered in vines, stars or embroideries, play an integral part in the decorum of these strange schemes (as confirmed by the titles of the pieces: Family with vines, Family with clover, …). Stéphane Kenkle scratches away at the varnish of the icons that stand on our shelves and urges us to perhaps reconsider these frames and the people who inhabit them.

Marie Birot, 2020.

La Kour madam Henry

Planter serait génial

« Nous avons besoin de vivre dans des petites oasis de vie et de fraternité. » (E. Morin)

Naître dans une île-oasis, c’est naître dans un rapport concret au vivant même si ce rapport nous est invisible car nous n’avons jamais pensé la nature comme une chose et nous autre chose. Le « piédbwa » (Kako) et la liane verte (Kenkle) ont ainsi commencé et continuent à parcourir nos « tableaux » à la manière de biographèmes, ces détails de vie à la genèse de la création.
Notre projet de planter a surgi lors d’une balade sur le terrain de Kako. Et renouer avec la terre a d’emblée signifié se nouer à la terre pour redonner place à la forêt primaire et à son imaginaire fantastique.
Moi Kako, j’ai grandi dans la forêt et dans les réalités agricoles, près du « ti jardin » d’un voisin maraîcher. Ses planches végétales colorées m’émerveillent et je me rêve alors agriculteur, dénommant, dépeignant les plantes et pieds de bois. Une expérience dans le modernisme productiviste me révèle le non-sens de l’orientation capitalisante de notre monde.
Moi Kenkle, je re-découvre le sens magique de l’île par des poètes, peintres et botanistes. Au détour d’un sentier de Mafate, la rencontre d’un planteur qui m’offre des « ti mélanz » de semences, garants de notre diversité, est celle d’un être en symbiose poétique avec la nature. Il voit dans les affleurements de terre des « horizons » et je suis subjugué par cette imprégnation atmosphérique et céleste dans le souterrain.
Nous avons donné notre premier « coup de pioche » en janvier 2019 en projetant la forêt et le jardin ensemble. Notre intention n’est pas de sanctuariser la nature mais cultiver notre jardin et regarder croître tous ces verts différents.

Kako et Stéphane Kenkle
Catalogue de l’exposition collective Mutual Core, commissariat Julie Crenn, Artothèque de La Réunion, 2021.

LIVRES

Philippe Descola, Les Lances du crépuscule, relation Jivaros, Haute-Amazonie, éditions Plon, 1993
Philippe Descola, Par-delà nature et culture, éditions Gallimard, 2005
Emanuele Coccia, La vie des plantes, une métaphysique du mélange, éditions Bibliothèque Rivages, 2016
Claude Lévis-Strauss, Tristes Tropiques, éditions Plon, 1955
Didier Christophe, Histoire de l’agriculture vue par les artistes, éditions l’Harmattan, 2021
Georges Bataille, La peinture préhistorique: Lascaux ou la naissance de l’art, éditions Skira, 1955

ARTISTES

Chéri Samba
Marlene Dumas
Dominique Zinkpè
Samuel Fosso
Gérard Garouste
Pierre Soulages
Damien Hirst
Anselm Kiefer

CHAMPS DE RÉFÉRENCES

Art
Agriculture
Photographie

Land art
Nouveau réalisme

Mots-clés

Famille
Couleurs primaires
Acrylique sur toile
Fond
Mise en scène
Contemplation
Horizons
Déguisement
Cultivation
Plants
Pioche
Serpette
Brouette

LIANAZ

Collectif aleAAA
Kour madam Henry, ZAD (zone agricole à défendre)

Resources and critical texts

Les histoires de peintures de Stéphane Kenkle

Par Loïc Le Gall

Stéphane Kenkle est essentiellement connu pour ses peintures. Il a été mu tôt par ce sentiment à la fois simple et viscéral pour un peintre : avoir le besoin et l’impression de pouvoir maîtriser chaque espace, chaque recoin de la toile et de tirer le meilleur d’une image. Son style est direct, sans fard, presque schématique. Les couleurs éclatent, souvent tranchées, sa palette originale n’oblige pas à un quelconque réalisme, bien que les œuvres de Kenkle soient figuratives.

Chemin en croix médiéval

Par Sarah Cherrière

Quelle mouche pique Stéphane Kenkle pour qu’il décide de peindre un chemin de croix en plein XXIe siècle, sans commande ni illumination pour motif ? Pour qu’il décide de consacrer 15 mois de son temps et de sa vie à la mise en scène des quatorze stations du calvaire de Jésus de Nazareth, seul, en grands formats et grands aplats ? À l’en croire, c’est le souvenir enluminé de gravures ou plus simplement encore de pieuses images divulguées au cours de séances de catéchisme qui l’a guidé depuis l’enfance jusqu’à cette exposition.

In lérd'fami - Sous le cliché

Par Sarah Cherrière

Stéphane Kenkle pose sur ces poses familiales un regard à la fois vibrant et pudique qui libère le tremblement de l’intime tout en conservant à ses figures la raideur des clichés d’origine et l’impassibilité du rituel social. Tout le monde est donc debout et Stéphane Kenkle peint la pose, ce qui provoque un discret effet de citation photographique mais injecte surtout, dans le vestige du souvenir, un rythme, une gamme chromatique et des motifs qui n’appartiennent qu’à lui. Les vêtements recouvrent de leur pudeur et de leurs coloris vivaces des corps peu loquaces. Les motifs et les couleurs des vêtements disent l’envers de la pose.