Jack Beng-Thi

MÀJ. 01.04.2025

Hommage à Gulabi Sapera, 2015

Demeure pour une danseuse

Demeure pour une danseuse (hommage à Gulabi Sapera), 2015
Installation, bambou, fibres végétales, céramiques, peinture, lumières, dessins
Hauteur 400 cm, diamètre 380 cm.
Peintures de Askok Kumar
Jawahar Kala Kendra (Centre d’art Jawahar), Jaïpur, Rajasthan, India


Demeure pour une danseuse (hommage à Gulabi Sapera), 2015
Film documentaire, 24 min 56 s.
Montage Nathalie Vindevogel


Performance d’inauguration : Rajasthan Lalit Kala Academy
Kalbelia residency 2015
Avec
Shri Umrao Salodia
Shri Shailendra Agrawal
Mr Vinay Sharma
Mrs Anita Meena
Mr Askok Kumar
Mr Ravikant Sharma
Mr Vidhya Sagar Upadhay
Dr Dirya Kumawat
Les artisans de bambou, les danseuses Kalbelia, les femmes de la construction de Jaïpur.

Remerciements :
Migline Paroumanou
Patrice Treuthardt
Masami Yamazaki
Kristel Chane Tho Wor
Tony Steel


« (…) Nilo Palenzuela : À Madagascar, l’intervention est différente.

Jack Beng-Thi : Il s’agit d’une construction pour le rituel des morts, faite de bambou et de feuilles d’arbre du voyageur. Elle a été construite à l’intérieur de Madagascar, dans le petit village d’Ambodiriana. J’ai travaillé en collaboration avec l’artiste belge Myrian Merch, qui vit à Madagascar depuis 30 ans, et qui a peint en outre, à l’intérieur, la figure animale du lémurien.

NP : En Inde, l’intervention évolue. Les femmes si présentes dans les rites auprès du baobab que vous avez représenté et gravé il y a longtemps, réapparaissent maintenant mais avec une signification de revendication très différente. La danse et la musique apparaissent également. Vous l’appelez Demeure pour une danseuse. Maintenant, vous envisagez une rencontre avec la culture hindoue d’une manière très particulière.

JBT : C’est une rencontre avec Gulabi Sapera. Quelque temps avant l’intervention, j’avais rêvé d’une danse soufie où mon corps tournait et tournait en permanence. Depuis quelque temps, j’avais aussi l’idée de travailler sur le territoire dont étaient originaires mes grands-parents maternels. Quand j’ai connu la danse des gitans d’Inde, j’ai vu que je pouvais établir la rencontre du corps qui tourne et du lieu de mes ancêtres. Je suis allé au Rajasthan, dans la ville de Jaïpur, après avoir établi des contacts avec l’université. Je voulais travailler avec Gulabi Sapera, la gitane de la caste des intouchables, qui ne pouvait même pas vivre dans la ville de Jaïpur. Eux vivent à Colona. Son peuple, sa famille vit du chant et de la danse dans les fêtes ou les rituels funèbres, les hommes jouent aussi pour charmer les serpents. Gulabi Sapera, après avoir été découverte par le chanteur français, Titi Robin, est devenue très connue. Elle et sa famille effectuent la « danse du serpent ». C’était une danse interdite, bien qu’elle soit aujourd’hui reconnue par l’UNESCO. Eh bien, je suis allé là-bas, j’ai pu compter sur la collaboration des universitaires, de Gulabi Sapera et de sa famille et j’ai réalisé la construction d’une demeure qui à présent prendrait la forme d’une robe, de la jupe de la personne qui danse, comme avec les soufis ou dans la « danse du serpent ». C’était une intervention qui provoquait le pouvoir, car la caste de Sapera devait se tenir éloignée de la ville de Jaipur et en plus cette danse même était interdite. J’ai établi un contact avec Sapera grâce à mon ami Danyèl Waro qui connaissait Titi Robin. Avec les étudiants et les artisans, j’ai alors réalisé la structure en tiges de bambou qui, selon la coutume du pays, ont été ensuite peintes avec des couleurs très vives : bleus, rouges, jaunes, blancs… Je suis intervenu à l’intérieur de l’espace et j’ai mélangé, comme cela se fait là-bas, de la boue et des excréments de vache, et j’ai dessiné un cercle rouge où j’ai représenté l’endormi, le caméléon endémique de la Réunion, qui est capable de tourner et retourner ses yeux en rond et dans différentes directions. L’intérieur et l’extérieur de la construction évoque la robe et les voiles de Gulabi Sapera, et le mouvement. C’est le moyen de se connecter avec ce monde, avec mon passé et avec mon présent.(…) »

Extrait d’un entretien mené par Nilo Valenzuela en 2019
Lire l’entretien complet