Fanal pou désot lo maye

Le tour des origines d’un nouveau monde – Madécasse

Exposition Le tour des origines d’un nouveau monde – Madécasse, commissariat Colette Pounia, galerie Hang’Art, Saint-Pierre, La Réunion, 2020.
Au premier plan, Fanal pou désot lo maye (Lanternes pour rejoindre l’autre monde, traduction Sophie Hoarau), 2020. Installation, troncs, acrylique sur toile et tissus.
À gauche, série Hoditra, à droite, série Les 7 filles d’Héva.

Voir les séries Hoditra et Les 7 filles d’Héva.


Fanal pou désot lo maye

Le spectateur est entré dans un temple. Il est conduit par les tableaux romantiques et surréels à contempler.
Et pour les contempler, il tourne autour de Fanal pou désot lo maye, une installation au sens artistique. Des vrais troncs, bruts, sortent des interstices d’un tressage de « lambamena » tissu de recouvrement des morts à Madagascar, s’élancent vers le très-haut, une œuvre textile conçue par l’artiste plasticien W. Zitte et réalisée par des femmes malgaches.
L’installation est cultuelle. A-t-on affaire à la recréation d’une tombe madécasse d’où s’érigent des aloalo, d’un culte aux ancêtres ? De celui qui nous a quittés il n’y a pas si longtemps que cela ? Ou d’un culte aux filles d’Héva ? Tout cela en même temps, je crois. Mais elle matérialise aussi les préoccupations de l’artiste : celle de vouloir faire du sacré en verticalisant le plan horizontal des tissus, des troncs calcinés porteurs de traces scripturales, des corps sans vie recouverts du linceul ou du vêtement d’apparat ; celle de vouloir palper l’impalpable, s’approcher du mort, approcher la mort…
Fanal pou désot lo maye est la proposition d’un espace sacré : on n’y pénètre pas, on peut s’en approcher et découvrir les longues entailles rougies.
La blessure produite par l’oubli de ce qui nous constitue est ravivée. Et je ne peux oublier que le tatouage, pratique ornementale identitaire que Kako réinvestit dans ses fonds picturaux de la série Hoditra est avant tout une production de blessures, de douleurs.

Colette Pounia
Extrait du texte paru dans le catalogue de l’exposition Le tour des origines d’un nouveau monde – Madécasse au Hang’Art, édition Kfactory, 2020.

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